Chapitre 8: Demi - Monde.
Par acquis de conscience, j’ai pris Azul avec moi et nous nous sommes baladés sur le campus de Columbia. Il y a quelques semaines, nous nous serions faits lynchés au moment même où nous aurions posé un pied dedans, cependant, le campus était presque vide et les rares étudiants qui courraient presque pour atteindre leur destination ne nous regardaient même pas. Ils préféraient inspecter les coins sombres et accélérer dès que quelque chose leur paraissait bizarre. Cette partie du Campus était devenue un no man’s land et plus les rares habitants le craindraient, plus la zone deviendrait métaphysiquement instable. En soupirant, Azul s’installa dans un banc et je m’agenouillais devant elle.
- Tu sens quelque chose ? Lui murmurais-je en suivant du regard une étudiante qui s’enfuyait à grand pas.
- C’est diffus. Cela dit, c’est la première fois que je dois sentir un meurtre de masse. (Elle soupira à nouveau) Je préfère les cimetières… C’est moins perturbant. Et toi, tu sens quoi ?
J’ai grimacé tout en passant la main sur ma nuque.
- Des relents de peur et de désespoir. Les victimes innocentes ont été les plus nombreuses… Mais je sens aussi une rage sous-jacente. Mais je ne comprends pas pourquoi.
- Vince… Je crois qu’il faudrait opérer une purge magique de la zone. Y’a des ondes qui ne me plaisent pas.
- Je les sens aussi. Et c’est à ce moment-là que je regrette de ne pas avoir pris Alcibiade avec nous. Il a dû déjà voir ou sentir de pareilles situations.
- Et tu es sûr de ne pas avoir senti de métamorphes la première fois ?
C’était une question que je m’étais posée une bonne centaine de fois et j’avais essayé de reconstruire ma mémoire de ces quelques heures en n’oubliant aucune sensation. Hunt m’avait aidé et nous étions tombés d’accord : Mis à part ceux qui étaient avec nous, il y’avait personne qui avait un parfum profond de fourrure.
- Aussi sur qu’il est possible.On commence le scan ?
Je la sentis trembler un peu mais elle se releva et me pris la main.
Il y a une ou deux années, Azul et moi avions tenté une petite expérience de symbiose des pouvoirs. Après tout, Zu était plus proche d’un métamorphe que n’importe quelle autre sorcière et sa magie nécromantique avait plus d’affinités avec ma nature vampirique qu’on ne l’aurait cru au premier abord. Elle ne pouvait pas me contrôler, pas plus que les autres vampires, mais elle se sentait plus à l’aise avec les vampires que les sorciers. De ce fait, nous avions tenté de mêler nos magies pour un test. Le résultat fut… étonnant. J’ignore encore quels sont tous les effets mais en mêlant nos magies, nous avons réussi à voir au-delà de la réalité. Nous avions fait ça dans des endroits merveilleux ou la joie avait marqué les pierres, masquant les peines.
Malheureusement, ce campus avait cessé d’être joyeux et empli des espérances des étudiants. Le sang nous a pris à la gorge au moment où nous avons plongé dans l’Entre-Deux, c’est le petit nom que nous avions donné à notre effet.
- J’ai froid… chuchota Azul en se pressant contre moi. Il y a eu trop de morts ici, ils attirent toute la chaleur à eux et nous plongent dans le froid.
- C’est rouge et ça sent la pourriture… Mais on est encore loin de l’épicentre…
Nous devions avoir l’air bizarre à nous tenir l’un à l’autre et à regarder dans le vide et à avoir l’air complètement perdus. On s’en fichait. Ce à quoi nous assistions était bien pire que ce qu’on penserait de nous.
- Tu veux voir de plus près ?
- On a le choix ?
- Non… Et j’espère qu’on va enfin trouver un écho un peu plus audible.
Nous avons continué à avancer à pas lents tout en nous retenant de vomir et de nous laisser tomber au sol. L’Entre-Deux était lourd de menaces et de gaz méphitiques et respirer devenait difficile. Comme je n’en avais pas trop besoin, je décidais de retenir ma respiration, l’odeur de pourriture commençait vraiment à m’asphyxier… Azul pointa la main vers un endroit étrange ou un vortex dispensait des volutes noires.
- L’épicentre doit être par là… Je sens que ça va être pire alors tiens moi fort…
J’aurais voulu ne plus respirer mais la panique m’a forcé à hyper ventiler. J’ai serré Azul contre moi et j’ai continué à avancer. Les cris commençaient à devenir audibles et perçants. Il y avait un début de joie, de soulagement puis tout devenait rouge sang. J’ai reniflé autant que j’ai pu pour deviner les émotions des fantômes. Beaucoup de volutes vertes et sans consistance, beaucoup de fractales orange et jaune et des spirales de lumière… De la joie, beaucoup de drogue et des lueurs d’espoir un peu partout : Je vais réussir mes examens, je vais avoir cette fille de mon lit, je vais perdre mes trois kilos superflus, je vais, je vais, je vais, je… Et puis leurs espoirs sont morts dans un hurlement de terreur… Non, pas tous.
- Là !
J’ai pointé du doigt un endroit que je ne voyais pas vraiment mais c’est là que j’ai entendu le premier hurlement bizarre. Un hurlement que je reconnaissais. J’ai lâché Azul pour avancer seul et heureusement qu’elle m’a retenue par le bras… Sinon, l’Entre-deux aurait disparu de mon regard et nous nous serions tapés la migraine du siècle. Malheureusement, notre jonction temporaire avait des effets secondaires qui nous empêchaient de le faire trop souvent. Personnellement, en plus de la migraine, je me mettais à me noyer dans mon propre sang. C’est moins grave qu’il n’y parait, je vous rassure… Enfin, ce n’est pas agréable non plus, y compris pour Azul qui me voit régulièrement cracher du sang pendant une bonne heure.
L’épicentre nous surprit tous les deux… Parce qu’il n’en restait plus rien. Je me doutais que l’université n’avait pas eu envie de laisser les gerbes de sang mais le fait d’avoir virer les décorations et d’avoir vidé entièrement les fraternités nous compliquait considérablement la tâche : La réalité se superposait aux échos et ça nous empêchait de comprendre au premier coup d’œil.
- Tes impressions ? murmurais-je à ma dragonne.
- Le plus vieux meurtre vient d’ici. Mais la victime n’est pas morte aussi rapidement qu’on ne pourrait le croire.
- Surprise, douleur, incompréhension, douleur, terreur, terreur, terreur, regret. Néant…
- Le meurtrier n’est pas resté. Il était couvert de sang mais il est parti sans que personne ne l’arrête. Tu le sens ?
Je me suis avancé un peu plus et j’ai essayé de sentir les échos de parfum. Je n’ai vraiment pas aimé ce que j’ai reniflé. Je n’ai vraiment pas aimé l’odeur acide et glacée d’une victime qui comprend que la personne qui l’entraîne là n’est pas une personne gentille. J’ai senti le parfum du sexe conquérant d’un homme qui avait décidé que la jeune fille allait lui servir de défouloir. J’ai senti la rage, j’ai senti la haine, j’ai senti la chair qui cédait sous les dents et la joie sombre d’avoir tué.
- Vince ?
- Elle allait se faire violer. Elle lui a arraché la gorge avec les dents.
Sans attendre de savoir si Azul me suivait, j’ai cherché l’aura de la tueuse. Une ombre rouge qui s’était ramassée pour paraître plus menaçante, un hurlement pour faire comprendre ce qu’elle avait fait et qu’elle était puissante, si puissante que parmi les ombres bleues qui étaient devant elle, il y en avait qui se ramassèrent sur elles-mêmes et virèrent au carmin.
- C’était une dominante. Elle les a tous appelé.
- Une dominante ? Une louve ?
Je reniflais encore une fois mais il n’y avait aucune odeur de fourrure, ni de nature. Ça sentait… le produit chimique. Je relevais le regard et essayait de compter rapidement les ombres cramoisies alors que l’Entre-deux prenait une pause.
- Ils sont tellement nombreux…
En entendant ma voix, Azul a du être inquiète puisqu’elle m’a entouré de ses bras et m’a fait un peu partager sa chaleur.
- Qui ça ?
- Les tueurs… Regarde.
Elle se décala un peu et regarda la mort frapper rapidement et à plusieurs endroits en même temps, de véritables étincelles de noirceur. Je sentis Azul trembler. Certes, elle savait qu’elle abritait en elle la seconde créature la plus dangereuse de la planète mais aucun métamorphe n’aurait pu assister à la réunion de plus d’une centaine de ses pairs sans connaitre la peur.
- Ce n’est pas normal. Marmonnais-je en prenant ma dragonne contre moi. Il n’est pas possible qu’autant d’aspirants soient mordus en même temps !
Azul s’est écarté de moi avec l’air étonné de quelqu’un qui a trouvé une théorie tellement fumeuse qu’elle ne peut être que vraie :
- Ils n’ont pas été mordus ! On les a contaminés !
- C’est la même chose…
- Non ! Ecoute-moi… Quand j’ai appris que j’étais devenu un dragon alors que je me suis fait mordre par une douzaine de loups, je me suis intéressée au Virus W. (Elle s’est arrêté un instant avec une moue bizarre.) Quelle dénomination à la con, quand même… Bref ! Tu sais que de trois à cinq mille personnes par an dans le continent américain sont contaminés par le virus et seulement trois loups-garous en naissent et seulement huit personnes en meurent.
- Mais… Les autres ne sont pas contaminés…
- Si ! par le sperme, les sécrétions vaginales, la salive, le sang bien sur… Dès qu’il y a une plaie ouverte ou un échange de fluide. Pourtant, malgré des milliers de contamination, aucune transformation en dehors des morsures. Pourquoi ?
- Parce que les contaminés ne meurent pas, je suppose.
- Presque… Parce que les contaminations ne se passent pas lors d’une attaque.
A force de retenir le sang dans mes poumons, je devenais cramoisi et la douleur m’empêchait de réfléchir. Je lâchais donc ma nécromancienne et fis s’effondrer l’Entre-deux avant de m’écarter pour cracher mon premier jet de sang. Azul se cassa en deux, terrassée par sa migraine. En magie, on appelle ces effets secondaires le contrecoup et plus le sort est puissant, plus le contrecoup est violent.
Je m’essuyais avec un mouchoir et j’essayais de reprendre contenance.
- Je croyais que c’était la mort qui provoquait la transformation.
- Pas seulement. Siffla Azul en essayant de faire taire les grandes orgues qui jouaient dans sa tête. En me basant sur mon expérience, je me suis transformée près de six mois après avoir été attaquée. Pourquoi moi et pas les autres ?
- Tu n’es pas morte lors des morsures.
- Exact. J’aurais pu vivre avec le virus W pendant des années mais celui-ci meurt dans le sang au bout de quelques jours.
Azul commença à vraiment souffrir et préféra s’asseoir alors que je subissais ma quinte de toux la plus violente. Il fallait vraiment que j’appelle quelqu’un pour qu’on vienne nous chercher parce que je n’étais pas bien sûr qu’on puisse revenir sans perdre connaissance durant le trajet.
- Alors, comment as-tu pu te transformer ? demandais-je après avoir expulsé un caillot de sang.
- J’ai une théorie mais elle est assez fumeuse…
- Au point où on en est.
- Mon attaque n’a été finie que quand je me suis transformée.
J’avoue que ça ne m’a pas semblé aussi fumeux que je le craignais. Tout en crachant régulièrement mes caillots, je me mis à réfléchir à la situation de ma dragonne et surtout comment le virus W avait pu vivre aussi longtemps, ou plutôt comment le virus avait-il su que le combat n’était pas terminé… A force de vivre en dépression, on finit par se renseigner et même si ça datait un peu, je me souvenais que j’avais pensé qu’un traitement hormonal aurait pu marcher et je m’étais plongé dans l’étude de l’usine chimique qu’était mon propre corps. Bon… J’admets bien volontiers que ma théorie aussi était fumeuse mais après tout…
- Noradrénaline.
- A tes souhaits. C’est un médoc ?
- Non, c’est l’hormone de la peur. Couplée à l’adrénaline, c’est elle qui te fait fuir devant un danger en pulvérisant les records de vitesse.
Elle m’a regardé d’un œil mauvais, m’accusant muettement de vouloir la faire réfléchir alors que le camion de sa migraine recommençait inlassablement son créneau sur sa tempe gauche. Contrairement à Dom, je ne tiens pas à ce que les gens trouvent mes raisonnements, alors j’ai expliqué le simplement du monde :
- Tout le temps où Mark te pourchassait, tu as eu peur, tu n’étais pas bien.
- C’est peu de le dire.
- Le Virus W est resté en toi parce que tu sécrétais de la Noradrénaline en permanence. Je crois qu’il s’en nourrit… ou du moins, la Noradrénaline a une action dessus. Bref, on s’en fout… Quand un aspirant meurt, toutes les glandes hormonales arrêtent de secréter quoique ce soit et c’est à ce moment-là que le Virus W nous transforme. Peut-être pour retrouver de la Noradrénaline, peut-être pour autre chose… mais devoir expliquer la magie par la science est un peu difficile…
- Mais ça explique pas le coup de folie de nos étudiants.
- Non. Mais on a un début de réponse. Toutes les autres contaminations ne débouchent pas sur cette tuerie. Pourquoi ?
Elle a réfléchit un instant en fronçant les sourcils.
- Euh… Parce que ce ne sont pas des morsures ?
- … Je sais pas… Mais je crois qu’il va falloir qu’on reprenne depuis le début : par les victimes.
724 dossiers à lire… 736 en fait, puisqu’on a comptabilisé les disparus en même temps que les morts… Ça en fait de la lecture ! J’ai réquisitionné le plus de personnes possibles : Ma meute en entier, bien sûr et malgré ses protestations, Karl et ses trois adjoints, qui l’avaient déjà un peu fait mais sans plus, et toute la Traque… Ainsi que le petit protégé de Sokol que j’avais accepté dans l’Extermination pour lui faire plaisir… Alors que c’était un ancien Chasseur d’Hommes ! Cela dit, Lucas, puisque c’était son nom, m’avait aidé un peu à comprendre les familles de chasseurs et à les traquer. Mais, parce que je suis un salopard, je l’ai pris avec moi pour nous enquiller une cinquantaine de dossiers.
Lucas savait que je le détestais et que je ne le gardais que parce que Sokol avait retrouvé le sourire en arrivant à convertir un chasseur et à le garder de notre côté. C’est sans doute pour cela que le chasseur oscillait entre la panique et le courage à la limite de la témérité. A la décharge du jeune homme, il ne m’affrontait que quand il avait raison et moi tort. J’aurais pu commencer à l’apprécier mais ma mauvaise foi m’empêchait de lui donner la plus petite chance. Je l’ai donc bloqué dans son petit bureau avec la pile de dossier. A sa tête, je me suis demandé s’il n’allait pas se mettre à pleurer. Pourtant, il a essayé la tentative de fuite :
- Vous… voulez pas que j’aille chercher un pot de café ? Ça nous aiderait à tenir.
- Non. On va s’en passer. On commence ?
Je suis vraiment un immonde salopard, des fois…
Il a soupiré presque silencieusement et a pris le premier dossier pour plonger dedans avec réticence.
Au bout d’une heure, il a relevé la tête en voulant soulager son cou et a marmonné :
- Mais pourquoi on demande pas aux Archives de faire ce boulot de merde… ?
- Parce que les Archives font de l’enquête de proximité auprès des familles. Et qu’ils ont aussi d’autres sujets à approfondir. Reprenez votre lecture, Westenra.
Lucas Westenra replongea donc dans son dossier avec un grognement de dépit.
- On cherche quoi, exactement ?
- Une idée sur la manière dont une partie de ces pauvres étudiants ont été contaminés par le Virus W… ou, à défaut, un point commun.
- Outre le fait qu’ils fassent partie de la même fraternité ou du même cours ?
- En effet, Monsieur Westenra. Vous commencez à comprendre.
J’ai adoré l’emmerder pendant des semaines… C’est mauvais, c’est très mauvais de ma part mais c’était une vengeance injuste sur un chasseur innocent. Je connaissais son dossier après tout… Les Westenra chassaient les vampires, certes, mais ils se focalisaient sur les éléments les plus violents. Ils restaient dangereux mais je pouvais comprendre leur volonté. Grâce à Lucas, nous avions eu beaucoup d’informations sur pas mal de familles de chasseurs et particulièrement sa propre cellule mais nous avions décidé que les Westenra seraient les derniers à être traqués. Sokol avait bon espoir de totalement retourner son chasseur avant qu’on puisse les détruire.
Après avoir fini nos piles, nous avons échangé les dossiers. Pour le moment, je n’avais trouvé que comme zone de contamination possible un bar étudiant mais je n’y croyais pas un seul instant : trop aléatoire et pas assez de maitrise. A moins que tout ça ne soit qu’un attentat terroriste mais nous n’avions reçu aucune revendication.
Et puis Lucas a marmonné :
- Deux mille trois-cent cinquante dollars…
Ce n’était pas sa paie, ça je le savais… Vu qu’il faisait partie de l’Extermination, sa paie montait à six fois cette somme. Normal, les primes de risque sont démentielles.
- Je vous demande pardon ?
- Hein ? (Il a levé la tête, surpris dans ces divagations.) Euh… Deux mille trois cent cinquante dollars. Ça fait quatre fois que je revois cette somme dans leurs relevés de banque. Sans doute une bourse…
Puis, il a replongé dans sa lecture sans se rendre compte qu’il avait peut-être trouvé quelque chose.
- Faites voir.
Avec un soupir, il m’a tendu l’un des relevés de banque d’une étudiante, une certaine Marcellina Torres, puis celui d’Orlando Matsham quand il a pu le retrouver. Pendant que j’essayais de déchiffrer la ligne de code qui désignait celui qui avait envoyé l’argent, je lui ai dit de me sortir tous les dossiers qui avaient un relevé de banque avec cette somme. Et puis, je me suis rendu compte que l’émetteur était Astella Corp.
En toute honnêteté, ça n’a pas fait tilt tout de suite. Il me semblait reconnaître le nom mais impossible de me souvenir dans quel contexte. Alors, j’ai tapé le nom sur internet[1]… Astella Corp, la gentille petite corporation pharmaceutique qui nous avait proposé un contrat de gestion de nos preuves… J’étais persuadé de psychoter mais quelque chose m’a retenu sur ce début de piste.
- Donc… Astella donne deux mille trois cent dollars à deux étudiants… commençais-je à voix haute.
- Euh, cinq pour être exact. Précisa Lucas alors qu’il me tendait les dossiers. Certaines grandes entreprises le font pour s’assurer d’avoir de bons employés à la sortie de la Fac.
- Alors… Autant j’aurais été d’accord avec vous sans réserve pour l’étudiante en chimie organique… Mais je voudrais bien qu’on m’explique l’étudiant en russe.
- Succursale à Moscou.
J’ai jeté l’un des dossiers devant moi.
- Mathématiques et statistiques ?
- Il me semble que c’est important en sciences médicales.
- Histoire de l’art ?
Pour le coup, Lucas a levé la tête et a essayé de trouver une explication logique… puis une explication un peu plus alambiquée mais plausible. Et puis, il a rendu les armes :
- Ok, là je sèche.
- Sans oublier un psychologue et un spécialiste de la littérature médiévale anglaise du XVème siècle. Mais il y a une autre raison pour laquelle un laboratoire pharmaceutique paye des étudiants.
- Laquelle ?
- Cobaye. Cela dit, je voudrais bien savoir quel médicament ils ont dû tester pour toucher une telle somme.
- Je connais pas vraiment le court du cobaye sur New York.
- Quelques centaines de dollars. Et une clause de confidentialité. On va vérifier qui parmi notre foule de victimes sont devenus des cobayes.
Vous le savez, on en a trouvé cent-douze. Là, j’ai vraiment commencé à avoir des sueurs froides. Techniquement, un métamorphe tout seul est déjà dangereux, mais au-delà de dix membres d’une même meute, ça devient une machine de guerre. Cent… Là, on tablait sur une conquête impossible à arrêter ou presque.
Alors que je sentais la sueur froide me couler le long de la colonne vertébrale, la porte du bureau s’est ouverte en grand. Vu mon état, j’ai failli sauter au plafond de peur et je suppose que mes yeux devenus rouges et noirs ont du donner une image assez forte de ma personne puisque le fou qui avait osé entrer sans frapper préféra se jeter genoux à terre et exposer sa gorge.
C’était Corey, le second de la meute d’Easton, un lion des montagnes pour autant que je m’en souvenais et assez dominant pour ne pas s’agenouiller devant n’importe qui. Il avait l’air d’être à peine adulte, pas très robuste mais je savais qu’il avait près de trois siècles et était un métis de colon français en Acadie et d’une femme Micmac. J’ignorais comment il avait été transformé à un âge aussi jeune mais malgré le changement de trois Alphas de sa meute, il était le pilier inébranlable de celle-ci, ayant assuré sa survie sans coup férir, malgré de nombreuses attaques d’Alphas européens. Je devais vraiment avoir l’ai effrayant pour qu’il décide de se soumettre aussi vite.
J’ai respiré lentement pour calmer ma colère et d’une voix douce, je me suis adressé au pauvre Corey :
- Désolé de cet accueil déplorable… Tout va bien ?
Corey décida de se passer de protocole et je décidais que vu ma propre bévue méritait bien un peu de vulgarité métamorphe. Il redressa la tête et me regarda presque dans les yeux, à la limite de l’insulte :
- On a trouvé quelque chose qui peut sans doute vous intéresser.
- Quoi donc ?
- Des témoins. Enfin… presque.
[1] (NDA) Alors… Soyons honnêtes, il existe une entreprise qui s’appelle Astellas Pharma, mais je suis bien sûre que ce ne sont pas les immondes salopards de mon Astella. Toutes mes excuses à Astellas Pharma, je suis persuadée que vous êtes des gens bien.