Chapitre 3: Friday Night.
Après quatre jours de recherche intensive, nous n’avions pas trouvé grand-chose. La faute étant à la foule de militaires qui nous devançaient à chaque fois et au désamour de la foule. Le massacre de Columbia nous avait fait un tort considérable et Victor se posait la question s’il devait désavouer son frère, le Fenris, ou le soutenir. Quant au Fenris, il encaissait et se taisait. Ses ambassadeurs martelaient qu’aucune Meute du Fenris n’étaient responsables du massacre, personne ne les croyait, le peuple américain intoxiqué par les antis surnaturels et ultra conservateurs. Cela dit, si ces pisse-froids ne nous avaient pas eu, je suis sûr qu’ils auraient continué à cracher sur les Mexicains, les musulmans, les homosexuels et les vendeurs de livres qui ne sont pas la bible.
Je soupçonnais les supérieurs de Martindale de ne pas avoir apprécié un seul instant que je mette ma truffe dans cette histoire et d’avoir demandé à leurs patrouilles de nous descendre en flammes auprès des habitants du Bronx. Nous n’avions pas, comme les services de police, de véritable autorité sur les civils, s’ils refusaient de nous parler, nous n’y pouvions pas grand-chose. De plus, l’accès à certaines zones devenait très compliqué quand l’armée nous interdisait de passer par les zones militaires… qui étaient évidement sur les axes importants. Quant à passer par les bouches de métro…
Le métro était coupé sur tout le Bronx, les bus ne passaient pas, on interdisait aux personnes qui avaient été dans la zone de quarantaine au moment de sa création d’en sortir et personne, mis à part les militaires et le Sicarius, n’était autorisé à y rentrer. Pour une raison que j’ignorais, la quarantaine du Bronx était à peine évoquée dans les médias alors qu’on nous vomissait à la gueule tout et n’importe quoi sur le Massacre de Columbia et particulièrement des reconstitutions fantaisistes sur les évènements. Comme nous n’avions jamais dit la vérité sur l’énorme créature qui avait attaqué la cour vampirique de la Nouvelle-Orléans, on prétendait qu’elle était toujours vivante et qu’elle avait échappé au Sicarius. Notre service de relations publiques travaillait jour et nuit pour essayer de redresser la barre mais sans nouveaux éléments, c’était peine perdue, surtout que les quelques survivants que nous avions trouvés nous avait été pris et envoyés sous surveillance en hôpital psychiatrique. Nous pouvions remercier le Juge Patel qui avait signé cette mise en demeure et qui nous avait gentiment court-circuités « pour la justice aux Etats-Unis. » Pauvre con, va.
On me convoqua au Pentagone, suite aux incidents avec Martindale. Au départ, je pensais à de la bonne volonté, enfin, mais ce fut une réprimande en bonne et due forme et l’ordre de ne plus m’en mêler. Dire que j’avais fait l’effort d’acheter un costume qui ne me pendait pas sur les épaules comme un sac poubelles…
Ce fut la première fois où nous avions été obligés de faire intervenir le conseil de sécurité de L’ONU. Victor avait joué des coudes pour entretenir d’excellentes relations avec la France, sans doute parce qu’il y vivait. La Tribu de métamorphes Ours de Moscou comptait en son sein pas loin de huit hauts gradés de l’armée Russe et deux autres qui étaient dans les équipes ministériels. Atra était sortie de sa réserve pour s’entretenir avec des dignitaires chinois et fut récompensée par une popularité démentielle, celle de la Grande Dame. Elle sacrifia même de sa personne, elle qui déteste les feux de la rampe, en acceptant un nombre important d’interviews et d’invitations sur des plateaux télés en Chine, donc, au Japon, en Corée et même en Inde. Avec l’aide de nos alliés, nous avons présenté une motion pour que les Etats-Unis acceptent de nous laisser faire notre boulot, surtout qu’ils s’y étaient engagés depuis la création du Sicarius…
Néanmoins, l’ONU est une machine lente. Le problème pouvait être bien plus grave car le temps que le gouvernement américain prenne acte de la résolution du conseil de sécurité, on pouvait perdre des mois. J’ignore si Astella avait pensé à tout ça quand ils ont commencé à cacher leur merdier sous un autre merdier… Mais c’était intelligent, je ne pouvais pas le nier. Je savais aussi que je m’étais mis dans cette merde tout seul mais j’avais pensé, et bon nombre de personnes avec moi, que nous aurions eu plus de temps pour nous faire une réputation.
Et puis… Il y avait les problèmes personnels. Mes avocats essayaient de me soustraire à une convocation du FBI, j’avais du travail par-dessus la tête et… je n’avais pas de temps à consacrer à Elena. Plusieurs fois j’ai essayé de l’inviter à un déjeuner ou un dîner sur le pouce et invariablement, ça finissait par un appel en urgence. Je voyais que ça l’emmerdait au plus haut point mais j’avais du mal à dire aux autorités que je mangeais avec ma petite copine et que je voudrais bien finir. De plus, ça faisait deux semaines que je n’avais pas vu le reste de la Meute dans sa totalité, juste pour boire un coup, faire une partie de poker ou une randonnée. Les liens de la Meute se distendaient et je ne pouvais rien y faire.
Le vendredi soir est une tradition que nous avions mise en place avec Dan depuis que ce petit rouquin arrogant avait dérobé sans le savoir une grosse partie de mon cœur. Un repas, toujours lui et moi et parfois avec Tray, Bobby, Allegro, Simon et Dom. Une manière pour Tray d’accepter la présence d’autres métamorphes et d’avoir des interactions avec eux sans qu’ils ne tentent de faire valoir leur domination. Pour Dan et moi, c’était juste un repas entre potes. Ce vendredi soir là, je devais être seul avec l’engeance du diable puisque Tray était de service à la caserne, que Bobby était en plein début d’année pour ses étudiants à Chicago et que le reste de la Meute ne pouvait pas venir pour différentes raisons. Pas une seule fois je n’ai pensé à inviter Elena ni même à évoquer la possibilité de sa présence. La raison était simple : Soirée entre couilles. J’avais commencé avant elle et je ne comptais pas changer de sitôt.
De plus, j’avais une raison bien spéciale de refuser la présence de ma petite copine lors de mes diners avec Dan. Cette raison s’appelle Bobby et j’y reviendrais plus tard.
A 17h, ce vendredi-là, j’avais tout envoyé chier à ma manière en précisant que je prenais ma soirée et en invitant la Meute toute entière à un repas chez Kyoichi, le japonais qui était au rez-de-chaussée, le lendemain. Les réponses ne furent pas vraiment celles que j’attendais… j’avais prévu d’amener Elena puisque nous étions en invitation plus un et mis à part Ash et Dom, tous répondirent non. Plus ou moins poliment, d’ailleurs. Je me doutais que Simon avait donné une vraie raison, à savoir la rougeole de son fils, mais Allegro et Azul avaient tenté de la faire plus diplomatique, ce qui hélas n’était pas moins blessant. J’ai donc annulé en me disant que j’allais inviter Elena seule et que ça lui ferait plaisir.
J’ai donc commencé mon petit rituel du Vendredi soir, qui consiste d’abord en une douche. Il faut savoir que Tray est un soumis d’une extrême jalousie, ce qui est de base un non-sens. Mais sa jalousie se manifestait par une perte d’estime de soi qui devenait assez tragique pour peu qu’on la pousse trop. De par sa nature de soumis, Tray avait assez peu de confiance en lui-même et dés qu’on touchait à son couple, ça devenait l’enfer. Dan en était conscient, je suppose, mais si, moi, j’essayais de le rassurer en ne marchant pas sur ses plates-bandes, le Rouquin préférait lui apprendre à s’en sortir seul. Tout çà pour dire que je prenais une douche afin qu’une fois chez Dan, je ne sente que moi-même et qu’il puisse me suivre à la trace dans l’entrepôt et qu’il se rassure en sentant que je n’étais pas allé dans leur lit.
Je sais. Ça parait bizarre. Ça ne l’est absolument pas pour les métamorphes même si les Félins ont moins d’odorat que les canidés.
Comme je vis au bureau et que mon coin de vie (Chambre et salle de bains) est indépendant de l’étage, j’eus la surprise de trouver Elena assise sur mon fauteuil. Comme je sais que tout le monde peut rentrer dans mon bureau, je ne sors jamais de ma salle de bains tout nu, surtout depuis qu’un inspecteur des stups était venu sans rendez-vous et avait été incapable de parler pendant une bonne dizaine de minutes.
Bon, j’exagère. Deux minutes de silence. C’est déjà pas mal.
Mais là, c’était juste Elena, Blonde et bronzée, vêtue d’un jean moulant et d’un haut sans manches bleu roi. Elle était magnifique et parfaitement consciente de son sex-appeal. Me voyant arriver torse et pieds nus, elle se mit a siffler comme un camionneur devant une pin-up.
- Le pantalon est en trop, ronronna-t-elle.
- Je sais… Mais je dois rester pudique au boulot. Après, y’a tout le monde qui bave à l’étage et le service de nettoyage demande des augmentations.
- Y’a encore quelqu’un à l’étage ? j’ai vu personne, moi.Elle jeta un coup d’œil suggestif à ma braguette et se lécha les lèvres. J’ai souri et j’ai fait sauter un bouton.
Elena et moi avions une entente sexuelle dingue. Loin d’être aussi vorace qu’Azul, elle était une amante très endurante et peu farouche. De plus, elle était très souple, ce qui est un sacré avantage quand on s’habitue à faire ça n’importe où.
Elle a eu un petit rire devant mon impertinence et m’a tiré à elle par la ceinture avant de faire sauter tous les autres boutons.
- Toujours pas de sous-vêtements ?
- Il fait trop chaud pour en porter…
- Je crois que je ne verrais l’un de tes caleçons que quand New York sera sous un mètre de neige.
Et elle me mordilla juste en dessous du nombril provoquant en moi un frisson de bas en haut de la colonne vertébrale. Normalement, je n’aime pas me faire mordre mais les dents humaines ne sont pas aussi dangereuses que les crocs surnaturels. Certes, je n’avais pas testé les dents des Faes mais bon… Et Elena savait se servir de sa bouche… Je lui ais cependant relevé le menton.
- De un, Ma Belle, je ne t’ai même pas dit bonjour. De deux, je sors de la douche.
- Je sais ! C’est parce que tu sens si bon que j’ai eu envie de croquer.
- J’avais dit pas les dents…
Je me suis penché sur elle pour lui lécher les lèvres et finir par l’embrasser. Elle se leva pour se coller à moi et faire glisser sa poitrine sur mon torse. Même à travers son haut et son soutien-gorge, je pouvais sentir les pointes dressées de ses seins. Au cas où son odeur de pommes reinettes craquantes qui montaient en température ne m’avait pas prévenu, rien que ça m’aurait indiquée son envie. J’étais plutôt content qu’elle préfère qu’on se frotte l’un contre l’autre et plus si affinités que de me reprocher mes absences. Elle a enlevé la serviette de mes cheveux et a entouré mon cou de ses bras puis elle a mis fin à notre baiser et m’a regardé dans les yeux.
- J’ai réussi à t’attraper, cette semaine ! je suis trop forte pour toi, Monsieur Feu-follet.
- Je sais… Je sais. J’avais prévu de ramper devant toi pour m’excuser mais je n’ai jamais eu le temps.
- J’aurais adoré de te voir ramper à mes pieds en suppliant pour mon pardon. Tu peux le faire maintenant ?
- Sans les fleurs et les chocolats qui vont avec ?
- Je m’en passerais. Mais c’est plus un problème de statut, n’est-ce pas ? Un alpha ne s’agenouille devant personne, c’est ça ?
- Techniquement, non. Sauf devant le Fenris. Mais il n’est pas aussi joli que toi.
- Merci…
Elle m’a mordillé la lèvre inférieure puis s’est éloignée pour s’asseoir sur mon bureau.
- J’ai ma soirée de libre, ça te tente un cinéma, un resto et une nuit de batifolages ?
Et… Aie. Normalement, ma petite amie n’avait jamais eu ses vendredis soir et je n’ai donc jamais eu la possibilité de lui expliquer ce que, moi, j’en faisais. Néanmoins, Dan et elle n’avaient aucun atome crochu. Bon, de base, Dan n’a aucun atome crochu avec qui que ce soit au prime abord, à mon avis mais pour Elena, ça n’a pas fonctionné, sans doute parce Mademoiselle a fait des réflexions sur les motos japonaises et c’est le seul sujet qu’il ne fallait pas aborder.
- J’ai déjà prévu un dîner avec Dan… Désolé.
- Oh. Fit-elle avec une petite moue.
Elle s’est reprise de très vite de son mouvement de colère mais je l’avais vu, pas de chance pour elle. Je suppose qu’elle a tenté de rattraper le coup à sa manière :
- Tu crois que je pourrais venir ? Depuis le temps qu’on me vante la cuisine de ton pote, j’avoue que j’aimerais bien y goûter.
- Ce n’est pas vraiment prévu, Elie.
- Tu as juste à l’appeler et lui dire que je m’incruste. Je suis sure qu’il y aura suffisamment de nourriture dans la gamelle du grand méchant loup pour moi, non ?
Je fronçais les sourcils au vu de ce qu’elle me demandait et je sentais sa jalousie s’échapper en volutes glacées de son parfum profond. J’aurais dû appeler Dan pour lui demander si une telle chose était possible et le prier de m’excuser pour annuler à quelques heures du soir. C’est ce que j’aurais dû faire mais en reniflant les effluves de jalousie d’Elena, je me rendis compte que je n’aimais vraiment pas cette odeur quand elle m’était destinée. Un instant, je me suis demandé si ce n’était pas Hunt qui m’avait imprégné de son dégoût pour ce parfum particulier mais je n’y croyais pas trop. Mon loup et moi avions trouvé une sorte d’équilibre concernant nos émotions et plutôt que de me faire ressentir les siennes, il préférait m’en parler. Sauf urgence, et ça n’en était pas une. Alors qu’Elena attendait ma réponse, je me mis à réfléchir sur la raison de cette jalousie et sur les moments où j’avais déjà senti son odeur. Les réponses ne m’ont pas plu du tout.
- Quand bien même je serais ravi de partager ma gamelle avec toi, je doute que Dan apprécie que j’impose quelqu’un sans l’avoir consulté vingt-quatre heures avant.
- Pourquoi ça ?
- Parce que ça bousculerait ses habitudes et qu’il n’a pas envie que tu picores dans mon assiette alors qu’il est capable de te faire à dîner.
Ce qui était vrai. Le Rouquin est un maniaque de l’Ordre et de la Sainte Organisation. Le moindre changement à ses plans le fait bouillir même s’il s’adapte parfaitement. Cependant, ce n’était pas toute la vérité : En fait, je ne voulais pas qu’elle vienne. Je voulais garder Dan pour moi et pour moi seul. Je le partageais déjà avec Tray, ce qui était le maximum que je pouvais tolérer. M’en rendre compte alors que ma petite amie était en face de moi et que j’étais la braguette ouverte m’a convaincu que j’étais une abominable personne. Et je me suis rendu compte que je n’avais aucun problème avec ça, juste une furieuse envie de mettre le problème de côté et c’est hélas ce que j’ai fait.
- Promis, je serais aussi discrète qu’une petite souris et je ferais même la vaisselle… essaya t’elle en désespoir de cause, ignorant que Dan pète les plombs si la vaisselle n’est pas correctement mise dans le lave-vaisselle, c'est-à-dire dans les compartiments prévus pour chaque type de vaisselle.
- C’est non. Ça fait des mois que c’est prévu et je ne vais pas annuler.
- Mais c’est l’une des rares soirées de libre que nous avons en commun !
- C’est toujours non.
C’est devenu vraiment moche après, surtout parce que je me refusais à donner mes vraies raisons et que mes arguments manquaient de force. Elena m’a pourchassé jusque dans ma chambre, alors que je choisissais un T-shirt et une veste, pour continuer à plaider sa cause… Malheureusement, ses arguments dévièrent rapidement sur le scabreux. Elle savait que Dan était gay, que moi-même j’étais bi et donc, je devais la tromper avec lui. En toute honnêteté, ça ne m’aurait pas déplu mais j’aimais trop le grand chat pour lui piquer son mec. De plus, j’étais persuadé que ce serait la fin du monde si je me mettais à courtiser mon rouquin…
J’ai fini par fuir. Je regrette encore maintenant de l’avoir fait puisqu’Elena m’a suivi jusqu’au rez-de-chaussée et que pas mal de monde a vu la crise et surtout le reste de la Meute.
J’étais tellement furieux de cette scène de ménage que je suis resté des heures entières à rouler en moto dans la ville. Ca me détend toujours mais cette fois-là, je n’avais pas vu le temps passer. Je suis donc arrivé en retard de plus d’une demi-heure. De plus, j’avais décidé d’acheter un pack de bières brunes pour faire excuser mon retard… Ce qui m’a mis encore plus en retard.
Il y a plusieurs années, Dan avait acheté un entrepôt désaffecté non loin de l’Hudson et avait consacré une bonne partie de ses gains d’ancien pilote de course pour en faire son antre. Comme il déteste le mot « Loft », l’entrepôt est et sera toujours l’entrepôt. Je suis resté quelques minutes sans bouger devant l’interphone qu’il avait installé et la grande porte métallique qui menait au garage, à me demander si j’avais fait le bon choix. Après tout, c’était nouveau pour moi, cette histoire de relation suivie. Jusqu’à Elena, je n’avais jamais été en couple véritable et jusqu’à Ben, je ne l’avais jamais envisagé. Cependant, à force d’entendre les autres en parler, je me doutais que c’était une question d’équilibre et de respect des volontés et peurs de l’autre. En m’adossant sur le mur de brique rouge et brune, je me suis demandé ce que je faisais de mal ou plutôt si j’en faisais assez. Aussi bizarre que ça puisse paraitre, la réponse m’apparut assez évidente : Oui, j’en faisais assez. Je l’avais imposée à ma Meute et c’était énorme. Malheureusement, elle ne le voyait pas comme ça. Je me dis qu’il faudrait sans doute que je lui explique ; après tout, elle n’était ni une Louve, ni une métamorphe et ce genre de comportements n’était pas instinctif pour elle.
Je n’y croyais pas. Pas un seul instant mais je me devais d’essayer.
Fort heureusement pour moi, Dan ne fit pas un seul commentaire sur mon monstrueux retard. En règle générale, dix minutes de retard suffisent à le rendre enragé mais pour les personnes qu’il aime bien, il laisse passer. Le fait qu’il le fasse avec moi me mit du baume au cœur. Me voyant par la caméra de sécurité, il remit le courant dans l’ascenseur, me permettant de monter dans l’appartement proprement dit, après être passé par le garage. J’avais laissé ma propre moto au dehors et j’ose croire qu’il apprécie ma retenue à ce sujet. Comme je l’ai déjà dit, Dan est un utilisateur convaincu des motos japonaises et moi, je possédais une Buell, une américaine, qui aurait détonné dans son garage. Je sais que c’est stupide et qu’il ne doit pas du tout penser comme ça mais je l’imaginais croire que ma Buell prendrait des airs supérieurs devant les deux Kawasaki et la Honda et que ça finirait en bain d’huile de vidange parce que les japonaises sont certes bien élevées mais aussi très revanchardes. Il ne faut pas prendre leur sourire métallisé pour autre chose qu’un prélude au massacre. C’était très con mais ça m’a toujours fait rire.
En sortant du monte-charge, j’ai été accueilli par les effluves d’un rôti de bœuf qui cuisait lentement au four et d’autres trucs moins carnés, donc moins intéressants pour moi. Dan était toujours dans son immense coin cuisine alors je fis comme d’habitude, je pendis ma veste en cuir sur la patère prévu à cet effet et j’enlevais mes bottes que je mis en dessous.
- Salut, ais-je dis à l’ombre de son dos.
- Hey, me répondit-il avant de s’essuyer les mains et de se retourner. Comment va ?
- Je pense que je vais me pendre avant la fin de la semaine. Et toi ?
J’ai posé le pack de bières sur le comptoir avant de lui demander si je les mettais au frais. Il acquiesça avant de reprendre :
- Ça ne servirait à rien. La dernière fois que j’ai vérifiée, tu ne respirais pas réellement. Pour moi… La routine, boulot, cuisine, sexe et dodo.
Il s’est rendu au bar pour sortir une bouteille de whisky et une autre de vodka. Il me connait bien… et il a dû sentir que j’avais besoin de m’imbiber même si je ne peux pas finir saoul.
- Va falloir que je me trouve une guillotine, donc… ais-je marmonné en rangeant les petites bouteilles dans le compartiment prévu à cet effet.
- Ça doit être fabricable mais je doute qu’on te laisse la garder au bureau.
- Je t’envie, tu sais. Ais-je lancé. Pour la routine.
- Ce n’est pas impossible pour toi… Cela dit, tu n’es pas le meilleur cuisinier que je connaisse.
Pure calomnie. Je cuisine très bien pour le peu que je cuisine. Ceci dit, la cuisine et Dan, c’est autre chose que les petits plats que je me prépare parce qu’il le faut. Quand Dan cuisine, il contrôle tout et je crois que c’est une manière pour lui d’exprimer sa grande loi Danesque sans que personne n’y trouve quoique ce soit à redire. Comme je n’ai pas eu envie d’alimenter la polémique, j’ai abondé dans son sens :
- Certes. Disons que mis à part la cuisine, je t’envie. Besoin d’un coup de main ?
- Non. Je t’ai même gardé l’os à moelle, sale cabot. T’auras de quoi mâchouiller.
Vous savez que ça, je l’ai expressément interdit dans toutes les relations avec les métamorphes de race canine ? Nous traiter de toutous ? C’est extrêmement insultant, normalement. Mais avec Dan, ça passe très bien. Sans doute parce que je l’appelle régulièrement l’engeance du diable ou le cousin Weasley. Ce sont nos petits noms affectueux.
Oui, nous sommes tarés. Ça suffit, maintenant.
- Et puis, reprit-il, tu as ton boulot et du sexe. Cela dit, le sommeil, je te le laisse de grand cœur, moi, je m’en passerais.
- C’est mon boulot actuel dont je me passerais… Je crois que l’univers a décide de me faire péter une durite.
- Et bah, c’est ça d’être le big boss. Ça va passer… Vous avez juste besoin d’un peu de temps et d’un bon coup de com’.
- Quant au sexe… oui, j’ai… Enfin quand Elena ne me saoule pas.
- Ah, Madame a fait sa petite crise ?
Si je n’avais pas su que Dan avait déjà catégorisé Elena comme chieuse insupportable et ne méritant pas ses efforts, cette simple phrase m’aurait ouvert les yeux. J’ai cependant acquiescé.
- Quelle en est la raison, cette fois-ci ?
- Le fait que je ne l’ai pas amenée ici, ce soir. Et que je n’ai même pas voulu t’appeler pour vérifier si tu acceptais sa venue.
- Ah ouais, quand même…
- Et le fait que j’ai besoin de mes soirées entre couilles, bordel !Il a souri avant de remplir son verre de whisky et de pousser la bouteille de vodka vers moi.
- Tu parles des couilles auxquelles elle rêverait de se faire agrafer, je suppose… Tu lui as pas dit que j’étais un connard ? La prochaine fois, tu la ramènes et je lui montre ma suprême misogynie.
- C’est pas toi le problème. Pas seulement… Le problème, c’est qu’il y a d’autres gens dans ma vie et autour de moi et que ça lui prend le temps que je pourrais passer avec elle.
Dan a grogné et a jeté un coup d’œil au four et aux casseroles qui bouillonnaient gentiment. Sans avoir l’air d’y penser, il marmonna :
- Combien de temps tu as passé avec ta meute, en dehors du boulot ?
Je ne sais pas comment il fait… Sincèrement, je ne sais pas comment il peut arriver à savoir ce qui fait le plus mal… Sans doute une déformation de son travail puisqu’il est secouriste mais ça reste très impressionnant.
- Pas autant que je le devrais… La dernière fois, c’était… y’a deux semaines, une petite course d’orientation.
- Je dois te faire la morale ?
- Quand bien même j’adorerais que tu appliques ta main vengeresse sur mon postérieur repentant, merci de t’abstenir.
- Je ne le ferais donc pas… Mais ça fait quatorze jours que tu n’as pas fédéré ta meute autour de toi.
- Avec la semaine de dingues qu’on vient d’avoir, c’est à peine si j’ai pu échanger trois mots qui n’aient pas eu trait au boulot avec ma meute… Je sais que c’est pas bon.
- Ah non… Tu vas droit dans le mur, mec. Au moment précis où tout le monde a besoin de stabilité.
Je me suis servi un verre de vodka que j’ai bu cul sec avant de m’en servir un autre. Je lui ais parlé de ma tentative de resto en commun et comment ça a fini.
- Et tu sais pourquoi ils ont refusé alors qu’ils crèvent tous de passer du temps avec leur alpha ?
- J’ai bien une idée de la raison…
- Seulement une idée ? parce que moi, je la vois bien, cette raison.
- Je m’en doute. Et ça me fait grave chier.
Dan a sorti la viande du four et j’ai eu un orgasme en reniflant le bœuf rôti avec les aromates. Quant à Hunt, il était sur le sol de mon crâne et les pattes en l’air dans une parodie de bien-être lupin.
- Pourquoi, Vince ? Et tu ne peux pas leur en vouloir.
J’ai consenti à abandonner mon paradis olfactif mais uniquement parce que je savais que j’allais en dévorer plus des trois-quarts.
- Ça me fait chier parce c’est de ma faute. Ils ont pas à gérer ni à supporter ma vie privée et j’ai l’impression que c’est quand même le cas.
- Chéri, tu peux pas être avec une personne possessive.
- Le pire, c’est qu’ils ont essayé de l’intégrer au groupe et de lui plaire. Je sais pas ce qu’il s’est passé mais… Putain, j’en ai entendu des vertes et des pas mûres…
- Ils t’aiment, tu peux pas leur en vouloir de t’aimer.
J’ai bu mon verre cul sec, le deuxième, avant de continuer.
- Eux n’ont rien dit. Ils se taisent et encaissent… Mais j’écoutais Elena, je les flanquerais tous à l’asile.
Il est vrai que, techniquement, Allegro avait toujours sa place à l’Asile de North Brother et on me rappelait régulièrement qu’il ne passait pas ses examens psychiatriques. Je savais qu’il allait bien et qu’il était aussi sain d’esprit qu’il était possible. Seulement, par jeu et sans doute par nostalgie, Allegro jouait encore Sonatine et quasiment tout le temps. A son sujet, je regrettais de ne pas avoir le temps de parler avec lui. De vraiment parler et d’être son psy parce que je me doutais qu’il commençait à se protéger avec le masque de son amour perdu.
Pendant que je posais mon verre dans le lave-vaisselle, Dan avait fini son whisky et sortait une bière du frigo. A partir de ce moment-là, je ne pourrais plus l’approcher à moins d’un mètre. Dans ma tête, Hunt éternuait déjà à cause des bulles.
- Tu vas avoir une décision à prendre… Tu le sais, ça ?
- Je sais.
Comme ça commençait à virer un peu trop soirée avec BFF et glace au chocolat-menthe, ou, comme le dira plus tard l’engeance du diable, comme la soirée entre couilles la plus vaginale possible, j’ai décidé de changer de sujet, alors que nous nous installions à table :
- Donc… tu n’aimes pas dormir.
Il m’a souri en me servant la part du lion en filet de bœuf et une petite portion de salsifis et de gnocchi. Pas une seconde il n’a été dupe de ma fuite et pourtant il a joué le jeu. Je suppose qu’il m’a laissé le temps de respirer.
- Que veux-tu ? C’est une perte de temps et j’essaye de dormir le moins possible.
- Et pourtant, tu dors au chaud, enroulé dans une fourrure de panthère des neiges ronronnante et aimante… Et tu t’aperçois que tu aimes ça. (J’ai ouvert grand les bras dans une parodie d’accueil) Bienvenue dans le côté obscur de la Couette !
Il m’a jeté son regard… Ce regard qui te cloue sur place et qui te fait te rendre compte que Dan n’est pas amusé. J’adore ce regard… J’adore qu’il essaye de m’épingler au mur et encore plus lui sourire avec impertinence.
- Va mâchonner ton os à moelle, sale cabot. Hunt en riait. Lui qui n’aurait pas supporté ça d’un autre jappait comme un labrador devant sa baballe, ce que j’exprimais par un aboiement aigu. Comme je m’en doutais, ça a eu le mérite de le faire sourire mais je voulais pousser un peu plus la blague :
- Tu sais… dormir n’est pas un crime. C’est une manière créative d’utiliser son lit mais… Enfin, s’il y a des gens qui te disent qu’ils n’aiment pas ça… et bien réponds-leur que ça ne les concerne pas.
- J’ai trop de choses à faire pour passer mon temps à dormir. Et tu grognes un peu trop, Rex ! Tu as besoin que je te sorte avant que tu pisses sur mon tapis ?
- Je te promets de me retenir et ne pas trop gratter à la porte. Mais avant de me mettre une laisse, laisse-moi manger, espèce de pervers.
- Oh, tu vas adorer ton nouveau collier en cuir et strass… Tu veux des chandelles avec ton repas, mon cœur ? Afin que tu te sentes désiré ?
- Non, merci… Je sais ce que tu comptes faire avec ces chandelles et je ne suis pas prêt à ça.
Il a froncé les sourcils et a émis un grognement dégoûté :
- C’était sale.
- Oh, tu as aimé, ne dis pas le contraire. Tiens… d’ailleurs, le service presse m’a transmis un truc, tu vas halluciner.
- Raconte… J’ai adoré l’idée de toi, moi, une laisse et des chandelles…
- Justement !
J’ai déplié ma serviette et j’ai plaqué les mains l’une contre l’autre avant de souhaiter bon appétit en japonais.
- On m’a envoyé une carte d’adhérent pour un club BDSM avec une lettre d’accompagnement me demandant s’il était possible que je fasse une intervention sur Soumission et Domination parmi les surnaturels.
- Oh, bon dieu… Refile la carte à un autre.
- Je leur ai surtout répondu que c’était très gentil mais non merci… Je vais peut-être la donner à Elena…
- Elle va te larguer… ou te la coincer dans l’urètre.
- Eh ! C’est un superbe cadeau, mec ! Je me suis renseigné : ce club coûte 200 dollars par mois, juste pour l’adhésion. Et ils m’ont envoyé la carte VIP.
Dan s’est servi à son tour avec beaucoup plus de légumes que moi et a pris une gorgée de bière.
- C’est un club Sado-Maso. Je te laisse imaginer ce qu’il va se passer dans sa petite tête de blonde manucurée.
- Une occasion inratable de me promener en laisse, je suppose.
- Tu as une trop haute opinion d’elle, mon pote. Elle ne te mérite pas.
- Bref… Tout ça pour dire que je leur ai envoyé une gentille petite lettre en précisant que la Soumission sexuelle n’avait rien à voir avec la Soumission de meute.
J’ai pris une bouchée de viande et je l’ai senti fondre sur ma langue. Le filet de bœuf est naturellement tendre mais là, il l’avait cuit à la perfection, juteuse et bleue comme je l’aime.
- Mec… Le bœuf est délicieux…
Je crois même que j’ai poussé un gémissement de plaisir et le sourire de Dan s’est élargi. Après tout, quel cuisinier n’aime pas qu’on le complimente sur ses plats ?
- Que veux-tu, je suis bon à marier. Et pour le BDSM, je te crois sur parole, je ne suis pas initié
- J’ai testé une fois, pour voir, il y a longtemps… Mais ce n’est pas pour moi. En toute honnêteté, je crois même que la Dom qui avait accepté de m’initier m’en veut toujours un peu. Il faut dire qu’on ne m’avait pas précisé que la balançoire sur laquelle on m’avait installé n’était pas faite pour que je me balance comme un gosse.
- Il faut dire que c’est tellement biaisé dans l’imaginaire collectif.
- Certains bouquins n’ont pas aidé. Ais-je fait remarqué.
- Oh, je sais… Bobby s’éclatait à me le lire à haute voix quand on était colocs.
- Lequel ? Celui qu’on se tape en plus au cinéma ?
- Exact…
Et il frémit de haut en bas. Ne croyez pas que Bobby soit un gentil garçon, tout adorable, parce qu’il vous sourit avec candeur… C’est un putain de sadique.
- Clara me l’avait fait lire pour avoir un résumé honnête. Je ne lui ai pas parlé pendant des semaines.
- Tu m’étonnes… Nos familles sont composées de connards.
- Ouais… On fonde un club ?
- Hors de question qu’on m’associe à toi.
Je me suis rejeté en arrière et j’ai posé ma main sur ma poitrine, comme si j’avais pris une balle.
- Tu m’as fait mal, là… Il s’est redressé et m’a filé une taloche.
- Hop ! Douleur envolée !
- Mais… ? Espèce de brute, va ! Ma pauvre petite personne fragile…
Pas un seul instant, Dan ne fut dupe. Il m’avait déjà vu sous ma forme lupine, il m’avait déjà vu me battre avec Simon et nous taper dessus comme des sourds. Je pouvais prendre un chargeur de mitraillette en entier sans me ressentir ralenti. Alors une taloche… Je pleure par courtoisie, en fait.
- Tu pourrais au moins faire semblant de me croire. Ais-je marmonné d’un air boudeur.
- Là, tu rêves.
Nous avons continué à papoter de tout et de rien et surtout de son boulot. C’est reposant. Je ne suis pas sûr de lui avoir dit un jour mais j’aime vraiment l’entendre parler de sa vie. Une vie normale et banale… Les petits problèmes et les grandes joies qui parsemaient son existence. Et les engueulades sur les motos. Depuis mon arrivée dans le monde de la Nuit, j’avais un mal fou à reprendre une vie basique, ne serait-ce que parce que je ne pouvais pas parler de la moitié des trucs qui m’arrivaient. Ça me manquait d’être comme les autres.
Au dessert, que j’avais trouvé tellement bon que j’avais laissé Hunt demander à Dan d’être le père de ses enfants, nous avons fini par reparler de mon problème… D’un problème qui n’aura jamais dû en être un :
- Mec, tu dois la dégager. Tu dois la dégager car au bout d’un moment elle va te demander de choisir entre elle et la meute… Si tu le fais pas, j’appelle ton père.
- Woh, woh, Woooh ! C’est quoi cette menace ? On partageait un moment d’émotions, là…
- C’était dans les notes que ta meute me laisse quand je te babysitte. M’a-t-il répondu avec un petit sourire.
Je rappelle que j’entends le mensonge dans la voix et dans les battements de cœur de mon interlocuteur. Il disait la vérité.
- Sérieux ?
Son sourire s’est élargi et je me suis dit que j’allais en écorcher un ou deux.
- Ecoute… Je sais que d’une certaine manière, c’est déjà fini entre nous deux. Mais je vais tenter un dernier truc. Et on verra.
- Tu veux que je vienne faire une scène devant elle ? Que je joue les faux amants jaloux ? J’ai laissé échapper un petit rire en m’imaginant le tableau.
- Je suis prêt à le faire, tu sais ! J’ai appris auprès de la plus grande Diva au monde.
Je savais qu’il en était parfaitement capable et c’était bien le problème :
- Elle est déjà persuadée qu’on a couché ensemble. Avec le chaton, aussi. Quelque part, je suis assez content qu’elle n’ait jamais croisé Bobby…
- Tu veux que je le fasse venir ? Il va la vaporiser sur place. Je me rends compte que je suis maintenant obligé de parler de Bobby.
Comment présenter Bobby sans le maquiller et tout en lui rendant justice ? C’est une tâche compliquée, très compliquée parce que Bobby est tout sauf une personne simple. J’ai mis un temps fou à le comprendre mais, à ma décharge, Bobby ne laisse personne s’approcher de trop près afin de ne pas voir le fond de son âme. A part Dan, bien sûr. Mais Dan a le pouvoir étrange de voir au plus profond de votre personne et de repérer ce qui ne va pas. Je suppose que pour lui c’est une déformation professionnelle.
Quant à Bobby, c’est une personne humaine. La personne humaine par excellence, dans toute sa splendeur et sa complexité. Il a un humour ravageur qui cache une sensibilité extrême et une grande fragilité. J’ignore encore la raison de cette fragilité mais, parfois ça me fait mal de le voir autant vulnérable. Et la seconde d’après, il remet cette carapace de Diva qui lui va si bien et montre un personnage adorable et blessant, drôle et incisif.
Mais la plus grande qualité de Bobby… c’est qu’il ne laissera jamais tomber ceux qu’il aime et qu’il se jetterai au feu pour eux. Il se trouve que j’étais l’une de ces personnes, suite à un diner que Dan avait organisé et qu’il m’avait collé toute la soirée. Je l’avais autant impressionné qu’attiré et il avait enchainé les doubles sens d’ordre sexuel pendant deux heures, sans interruption. Hunt avait écouté avec intérêt et apprécié la voix de ce professeur de biologie qui savait aussi bien moduler sa voix au gré de ses histoires. Sincèrement, si j’avais été célibataire, j’aurais accepté ses soixante-trois propositions plus quelques-unes de mon cru…
Cela dit en passant, j’ai déjà vu Bobby détruire quelqu’un par la seule force de ses piques verbales.
- Ne me tente pas… J’imagine déjà la scène et je vois déjà la meute faire la Ola derrière lui.
- Un oui et je lui paye l’avion.
- Non… JE lui paye l’avion.
Après tout, c’était le moins que je pouvais faire mais l’engeance du diable ne l’entendit pas de la même manière :
- Mon meilleur ami, mon poids financier.
- Mes emmerdes, je paye.
- On verra !
Le nombre d’engueulades qu’on a pu avoir sur la question de qui paye… J’avoue ne pas comprendre pourquoi il tient tant que ça à tout payer tout en sachant pertinemment que je suis un gosse de riche.
- Laisse-moi au moins payer le billet de retour et le resto pour tout le monde.
- Si je choisis le resto.
- Cela va de soi. Tu crois qu’il acceptera ?
- Bien sûr… (Il s’est penché sur moi avec une moue compatissante) Mais tu sais que c’est lâche, hein ? C’est juste une solution de dernier recours.
- Je sais. C’est juste que je ne sais pas larguer les gens. J’ai jamais fait ça.
- Tu as juste à le dire. Et si elle s’accroche, on appelle Bobby.
Nous nous sommes levés pour faire la vaisselle à la main. Oui, ça parait étrange mais c’est un de mes petits plaisirs que de faire la vaisselle à la main avec un pote qui essuie les assiettes. Mais avant que je puisse me saisir de l’éponge, Dan lança sa dernière pique :
- Mais tu es conscient que c’est une solution de lâche ?
Mesdames, messieurs, j’ai l’honneur de vous présenter Dan-Ma-Conscience.